SAKURA ACADEMY – La victoire par la paix
Au nom de mon école, je souhaite aborder un sujet à la fois vaste, passionnant et essentiel : le sens de la tradition en Aïkido. C’est précisément pour cela que j’ai choisi de fonder une académie traditionnelle.
L’Aïkido possède à la fois une forme matérielle – technique – et une dimension spirituelle. Il n’est pas toujours facile pour chacun de saisir cette double réalité. Pour illustrer cela simplement, je dirais que l’union harmonieuse de ces deux aspects permet de réaliser la victoire par la paix.
Prenons un exemple concret. Si, au moment d’une agression, vous parvenez – par votre sang-froid et votre maîtrise technique – à neutraliser votre adversaire sans le blesser ni l’humilier, alors vous avez remporté une victoire authentique. Ce type de défaite, pour l’agresseur, a souvent plus de valeur qu’une punition corporelle. Un homme mis à la merci d’un autre qui aurait pu lui briser un bras, voire lui ôter la vie – mais qui choisit de ne pas le faire – reçoit une leçon qui marque l’esprit plus durablement que n’importe quelle sanction.
Ne peut-on pas considérer qu’éviter le combat par tous les moyens est plus noble, plus digne, et surtout plus humain que de chercher à vaincre coûte que coûte ?
Je l’avoue : je ne suis pas toujours capable d’appliquer cette doctrine à la lettre. Je manque parfois de la force de volonté ou de la sagesse nécessaire. Mais lorsque j’y parviens, même ponctuellement, je ressens une joie intérieure sincère.
Dans mes anciennes fonctions professionnelles, j’ai été confronté à de nombreuses situations de crise, où la confrontation physique était inévitable. C’est justement ce vécu qui m’a conduit vers l’Aïkido, et non vers une autre discipline martiale. Car dans l’Aïkido, je trouve une voie plus haute que celle de la simple domination : une quête de maîtrise de soi.
Et aujourd’hui, ces petites victoires sur moi-même deviennent plus fréquentes. Elles me sont bien plus précieuses que toutes les victoires obtenues par la force.
Je ne suis pas un philosophe. À vrai dire, j’ai longtemps préféré l’action directe à la réflexion. Mais avec les années, je remarque un changement en moi : ma façon de percevoir le monde, de juger les événements, a évolué. Je m’efforce désormais d’acquérir ce sang-froid dont l’Aïkido m’a appris la valeur. Je ne serai jamais un modèle absolu de patience, mais je me console en pensant à ce que je serais devenu si je n’avais pas entrepris ce chemin d’amélioration personnelle.
Grâce à la maturité acquise par la pratique et les expériences partagées avec mes maîtres et partenaires, mon étude ne cesse de s’enrichir. J’ai donc décidé de transmettre cette expérience à travers une académie internationale, fondée sur les valeurs de la tradition, sur l’héritage de mes anciens, et sur mon propre parcours martial.
Mais je veux inscrire cette démarche dans le présent, en utilisant les outils modernes à notre disposition. Je me nourris du passé pour mieux progresser aujourd’hui.
Je tiens à conserver l’essence de l’enseignement traditionnel, car pour moi, la tradition est une référence, un point de départ. Elle n’est pas un dogme rigide ni un moule figé, comme cela semble encore trop souvent le cas dans certaines écoles.
Le système traditionnel que je mets en place repose sur des règles claires, destinées à préserver la qualité, la morale, et les secrets de notre art. Ce sont ces éléments qui font la singularité de notre école.
Au sein de Sakura Academy, j’attends des élèves qu’ils s’engagent aussi dans un esprit de solidarité, fondé sur la fraternité et le respect mutuel.
Grâce à mes nombreux déplacements dans le monde, j’ai développé une méthode de transmission accessible à tous. Chaque étape de l’apprentissage est liée à des repères visuels ou gestuels clairs. Ainsi, un élève peut suivre un cours, même à l’étranger, sans forcément comprendre la langue, mais en sachant précisément ce qu’on attend de lui.
De cette manière, malgré les différences culturelles ou les évolutions techniques, un pratiquant des années 70 projeté à notre époque pourrait retrouver dans notre académie l’essence de ce qu’il a connu. C’est ce que je souhaite offrir aux élèves d’aujourd’hui et de demain.
Et inversement, nous-mêmes, modernes pratiquants, ne sommes pas plus dépaysés lorsque nous posons un pied dans un dojo au Maroc, en Belgique ou au Sénégal – mes trois lieux d’ancrage actuels.
Cette constance dans les repères, ces rites communs, cette temporalité partagée : tout cela garantit la pérennité d’un idéal dans le cœur de chacun.
Notre mission commune est d’unir le corps et l’esprit à travers la pratique de l’Aïkido, afin de découvrir peu à peu notre vie intérieure, notre juste place dans l’univers – bref, le sens de notre destin.
Je sais que cette initiative est une longue quête. Mais je suis convaincu qu’elle peut mener chaque pratiquant sincère vers le vrai, le juste, vers sa propre vérité intérieure.
Pour avancer sur cette voie, j’ai choisi la méthode traditionnelle. Une méthode fondée sur l’expérience, la rigueur, l’apprentissage par imprégnation et par imitation.
Mais attention : je ne prétends pas que notre méthode soit la seule valable. Il ne s’agit en rien d’un système figé, ni d’une doctrine totalitaire.
Il n’existe pas une bonne pédagogie universelle, pas même de style unique à enseigner. Car il n’y a pas, à proprement parler, de contenu à apprendre, mais une voie à vivre.
L’Aïkido est une forme de créativité personnelle, une expression authentique de soi construite sur des bases solides. Et pourtant, son essence reste intangible.
Notre travail à Sakura Academy consiste à concilier savoir et connaissance, tradition et modernité, pour participer à l’enrichissement spirituel et humaniste de notre époque.
La tradition, étymologiquement, c’est l’action de transmettre, de faire passer quelque chose d’essentiel d’une main à l’autre. Et cela, c’est un art en soi.

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